SACRE

sacre

Cette action de médiation a eu lieu dans le cadre du Projet culturel de deuxième année. Les quinze étudiantes et étudiants de SciencesPo Saint-Germain-en-Laye inscrits au projet, ont travaillé, l’hiver 2017, dans la Petite galerie du musée du Louvre sur l’exposition Théâtre du pouvoir. 

La médiation effectuée par les étudiant.e.s, lors des nocturnes -les Jeunes ont la parole-, insistait particulièrement sur la dimension plastique et politique des œuvres.

Cette première médiation effectuée, proposition a été faite aux étudiant.e.s de travailler sur le Sacre de Napoléon de Jacques-Louis David pour les nocturnes -JOP- du printemps 2018. L’idée étant de réaliser ensemble une médiation théâtralisée devant l’œuvre même, la monumentalité du lieu et du tableau le permettant.

Chaque étudiante et chaque étudiant a choisi un personnage et en a fait un sujet de recherche pour le mettre en jeu suivant la restitution du Sacre. La performance collective n’excède pas une demi-heure. Le public a été convié à deux représentations par soirée. 

Toutes les personnes qui ont assisté à l’une des représentations, découvraient ainsi l’histoire et les enjeux politiques de cette œuvre commémorative du Sacre du 2 décembre 1804, réalisée entre 1806 et 1807, par Jacques-Louis David, premier peintre de l’Empereur.

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Les actrices et acteurs :

Emma Brand / l’ambassadeur Ottoman, Justine Caffeau / César, Léon Cambou / le prêtre grec, Baptiste de Cara / le Pape Pie VII, Juliette Charpin / Adélaïde de La Rochefoucault, Diane Chefdor / Napoléon-Charles Bonaparte, Justine Coulier / Laetizia Bonaparte, Aurane Dibeu / Elisa Bonaparte, Alizé Jariod / le reporter, Arnold Legœui / Napoléon 1er, Mathilde Malevergne / Emilie de Beauharnais, Ludivine Poulet / Pauline Bonaparte, Paul Pradelle / Talleyrand, Hélène Ventimiglia / Joséphine de Beauharnais, Mahaut de Villeneuve / Jacques-Louis David 

Les assistante et assistants :

Marion Boudier – dramaturge, Frédéric Ciriez – écrivain, Joël Paubel – plasticien

Les partenaires : 

Le Musée du Louvre ; Anne-Sophie Vergnes, chargée de programmation

La Maison des écrivains et de la Littérature (Mel) ; Virginie Fresnay, chargée de mission

Le réalisateur du film :

Nils Paubel, vidéaste

Sciences-Po Saint Germain-en-Laye, mai 2018 :

Céline Braconnier, directrice

Joël Paubel, chargé de mission Arts & humanités

Jérémy Magne, directeur de la communication

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Texte intégral de la représentation :

1. CORTÈGE

Les invités au Sacre se tiennent à l’entrée de la salle, près des escalier, en cortège autour du couple impériale. Ils discutent entre eux, par petits groupes, encadrés par un service d’ordre qui les sépare de la foule du public. Une journaliste en direct à la télévision commente la situation. 

REPORTER. Mesdames et Messieurs, il est 11 heures, nous sommes en direct de la cérémonie de couronnement de l’empereur Napoléon qui va commencer dans quelques instants. Le ciel est très couvert, et le froid nous fait tous souffrir. (A une dame dans le public 🙂 Vous attendez depuis longtemps ? (A une autre personne 🙂 Il fait bien froid, vous ne trouvez pas ? L’église Notre-Dame n’est vraiment pas faite pour les tenues légères ! Quelle idée de faire un sacre un 2 décembre ! (Elle reprend le descriptif pour la télévision) 25 carrosses ont traversé Paris ce matin. 52 chevaux composaient le cortège. En tout 80 000 soldats ont été mobilisés pour cette occasion exceptionnel ! Mesdames et messieurs, vous vous en rendez compte ? 

NAPOLÉON CHARLES (montrant du doigt dans le cortège). Oh maman regardez, il y a monsieur Jean-François Lebrun l’architrésorier ! 

REPORTER. Que de beau monde présent aujourd’hui ! Voyez vous cela, Messieurs Talleyrand et Foucher accrochés l’un à l’autre ! Et voici Elisa et Pauline Bonaparte…

SŒUR 1. Quelle glorieuse journée pour notre frère ! 

SŒUR 2. Je suis si fière si seulement père nous voyait…  

SŒUR 1 . Et si seulement mère était là ! … 

NAPOLÉON CHARLES. Oh maman regardez, il y a Jean-Jacques Régis de Cambacérès l’archichancelier !

SŒUR 1 (à sa soeur). Après l’ascension de notre frère ça sera notre tour, il me fera princesse de Lucque…

SŒUR  2. En effet, ma soeur nous allons enfin avoir la place qui nous revient…. 

REPORTER. Ce moment marquera l’histoire, mesdames et messieurs ! Mesdames et messieurs, ce magnifique cortège n’est plus qu’à quelques mètres de l’entrée de la cathédrale, il va faire son entrée. 

Le cortège se met en marche.

REPORTER. Les cloches qui résonnent depuis ce matin commencent à me donner mal à la tête !

NAPOLÉON CHARLES. Oh maman regardez, il y a Louis Alexandre Berthier le ministre de la guerre !

REPORTER. Mesdames et monsieur, vous pouvez admirer, le couple impérial, quelle démarche, quel naturel ! Notre Dame est absolument métamorphosée pour cette occasion unique. Vous voyez derrière moi un magnifique décor greco-romain ! On ne reconnait plus Notre-dame ! Admirez donc ce style greco-romain cher à l’empereur : quelle beauté ces pilastres et drapés dans cette cathédrale si froide ! »

NAPOLÉON CHARLES. Oh maman regardez, il y a même le pape !

REPORTER. Mesdames, admirez les dames d’atours de Joséphine, Adélaïde de la Rochefoucauld et Emilie de Beauharnais. Derrière elles, nous avons déjà aperçu tout à l’heure les soeurs de Napoléon, Elisa et Pauline. 

SŒUR 1 (à sa soeur). Notre famille entre dans l’histoire…

SŒUR 2. …cela jouera forcément en nos faveurs ! 

REPORTER. Oh Messieurs, regardez donc la prestance de Napoléon, quel exemple pour les Français !  A ses côtés le pape et les hauts représentants du clergé. Mesdames et Messieurs, nous sommes en présence des plus importants membres de la société française. (Pendant que le cortège se met en place pour la cérémonie 🙂 Juste derrière moi se trouve les présidents des conseils généraux. Nous pouvons voir aussi les membres du Sénat, avec à leurs cotés les membres du Tribunat. Il y a également, Mesdames et Messieurs, les préfets, les ministres et conseilles d’Etat. Au fond, nous voyons, mesdames et messieurs, les grands officiers de la Legion d’Honneur et les magistrats. Brrr, il fait vraiment froid !! 

2. TABLEAU

Tous les membres du Sacre se figent en miroir du tableau.

NAPOLÉON CHARLES (sautillant parmis le groupe). 1, 2, 3 soleil ! 1, 2, 3 soleil ! Maman, maman ! Regardez Napoléon ! Il a pris la couronne des mains du Pape. Regardez ce pauvre Pie VII, tellement choqué, il est presque tombé sur son siège ! Maman n’aime pas que je m’amuse des hommes d’église, elle dit que c’est pêché, que j’irai en enfer si je continue. (Au public : ) Moi je m’ennuie terriblement… Maman dit que je dois être sage et courtois, qu’un jour moi aussi j’aurais une couronne car je suis le successeur légitime de mon oncle, qui est aussi mon grand père, mais c’est une longue histoire ! Une chose est sûre : moi empereur, je ne porterai pas de toge à la manière des romains. Ce n’est pas pratique pour grimper aux arbres ! Moi empereur,  j’autoriserai les enfants à s’amuser des hommes d’église. Moi empereur, je demanderai au plus grand médecin du royaume de donner une liqueur d’amour à maman pour qu’elle aime papa. Moi empereur, je ne mourrai pas dans 3 ans. Regardez maman, un monsieur avec un beau turban !

Halet Efendi, portant un turban à l’image du tableau, se détache du groupe pour s’adresser au public.

HALET EFENDI. David que l’on admire jusque la Sublime Porte me dépeint ici caché dans une vulgaire escorte Parmi ces ambassadeurs tous plus ridicules, me voici observant l’illégitime consul  Celui que l’on encense comme un grandiose créateur ôse me peindre sous les traits de mon prédécesseur N’a t-on pas devant nous un faste diffamateur de plus, lâche laquais d’un prétendu empereur ? Vouloir s’essayer au néo-clacissisme, vous enferme dans les rêves de l’orientalisme Vous osez nous accuser des pires barbarismes, aveuglés par votre padichah gonflé d’amateurisme À cet ineffable malheur, je répondrai par la plus grande douceur “Bir hükümdarın gülüşü sizi sarhoş etmesin, ağzı bir aslanın dişlerini görmenizi sağlar.”

REPORTER (traduisant à voix basse) : « Qu’un sourire du monarque ne vous enivre pas, sa bouche laisse entrevoir les dents du lion. »

DAME D’ATOURS. Oh Adélaïde, nous avons tant bossé pour qu’elle soit la plus belle des femmes, regardez moi ces tissus tout droit venus de Lyon! Nous pouvons être fiers du résultat voici une belle robe en mousseline, fluide, longue, légère, dans ses tons ocres et rougeâtres…

DAME D’HONNEUR. Vous avez tout à fait raison Emilie, il est terminé ce temps, sous l’Ancien Régime, où toutes les femmes portaient des robes à corsets, des parures et des fils d’or et d’argent ! Notre Joséphine lance LA tendance 2018 !

DAME D’ATOURS. Grâce à mon ami, Hippolyte Leroy, couturier officiel de l’Impératrice, Joséphine deviendra aussi unique que sa tenue ! 

3. DISCOURS 

REPORTER (coupant la dame d’atours). Silence ! Mesdames et messieurs, l’empereur va adresser son discours à la Nation… 

La reporter assure la traduction simultanée du discours en angalis, à vois basse et monocorde. Le groupe écoute.

EMPEREUR. Français, françaises, l’Empire est réuni ici : Rois, ducs, barons et même princes sont ici pour assister à la gloire de la France et à l’écriture du plus beau chapitre de son Histoire ! Nous avons rendu à la France sa force et son prestige, celle qui faisait encore peur par ses idées et ses tumultes s’est apaisée et elle est ressortie plus forte que jamais, capable de conquérir l’Europe et de tenir tête à ceux qui l’ont méprisé. La France outragée, la France brisée, la France martyrisée mais aujourd’hui l’Empire glorifié par ses victoires et ses conquêtes. Tous ici peuvent s’enorgueillir de ces succès. Et à ceux qui prétendent tout savoir mais qui n’agissent jamais, terrés dans leurs titres et dans la facilité de l’inaction et du mutisme, il ne suffit que de regarder leur présence et leurs manières, cultivant les apparences car c’est de la seule culture dont ils sont munis. Certains ici sont la vanité appuyée sur le bras du mensonge. Assistance ! Mesurez la chance que vous avez d’être des acteurs de l’Histoire car du haut de ce tableau, deux siècles vous contemplent.

Applaudissements continus. L’empereur se retourne pour se prendre en photo devant le public puis rejoint sa place. Les membres de l’entourage de l’empereur viennent le féliciter et l’embrasser pendant que la reporter reprend son commentaire.

REPORTER. Nous assistons à un grand moment mesdames et messieurs ! Se poser ainsi la couronne sur la tête ! Nous sommes tous ici bouleversés ! Je sens l’émerveillement dans la salle ! Je suis moi même toute émue ! Quelle joie ! Quelle liesse nous anime tous ici !  »

Talleyrand se détache du groupe pour s’adresser au public. 

TALLEYRAND. Voyez l’homme amusé, c’est moi ! 

UNE VOIX DANS LE PUBLIC. Qui ça, moi ?!

TALLEYRAND. Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord, aristocrate d’ancien-régime, descendant de l’illustre Maison des princes de Chalais, Vice-grand électeur de l’empire, grand chambellan de la Cour. Évêque apostat, renégat, défroqué ; ma maîtresse à 18 ans 

UNE VOIX DANS LE PUBLIC. Quoi ?! mais vous avez une maîtresse ?!

TALLEYRAND. Elle vit sous mon toit, c’est la femme de mon neveu, toute la France en parle et s’en accommode fort bien. (Se tournant vers Napoléon 🙂 Mais regardez donc le petit caporal ! Il n’est même pas parvenu, le voilà tout juste arrivé. Mais quel dommage qu’un si grand homme ne soit paresseux. La france, il ne la voit qu’en crue, toujours hors d’elle-même, conquérante. Et puis ce faste, ce ridicule ! Tant de pompe et pour quel résultat je vous le demande ? L’excès caractérise ceux qui ne sont pas bien nés. Cela se voit, cela se sait. Allons ! mon rêve d’une monarchie anglaise, d’un régime assagit, délivré de la chimère révolutionnaire peut encore attendre. Quels serments ne lui aurais-je déjà sacrifiés.

REPORTER. Ahem… Bien. Quel euh commentaire de la part de Monsieur Talleyrand. (gênée) Je disais donc, ce moment de liesse générale, ce moment historique, mesdames et messieurs, va être capturé par le peintre officiel de notre empereur, Jacques-Louis David. Ah ! Justement, je l’aperçois ! Nous allons l’approcher.

4. LE PEINTRE. 

La reporter fend la foule du public pour rejoindre David devant son portrait.

REPORTER. Mon cher David, c’est un plaisir de vous voir ! C’est une tâche ardue qui vous attend ! Peindre un tel moment ! Comment allez-vous faire ? Avez-vous un cahier des charges à respecter ?

DAVID. En tant que peintre officiel de l’Empire, c’est à moi que s’est adressé Napoléon pour cette commande, qui regroupe 4 toiles retraçant son régime : la distribution des aigles, l’arrivée à l’Hôtel de Ville, l’intronisation de Napoléon et son couronnement. Je n’en réaliserai finalement que deux. Je dois recevoir des milliers francs pour ce tableau : je prendrai donc la plus grande toile de mon atelier, je convoquerai tous mes assistants, et je m’aiderai de nombreux modèles pour le réaliser. Je choisirai le style néo-classique, puisque c’est à ce mouvement artistique à l’organisation rigoureuse auquel j’ai adhéré lors de mon séjour en Italie. Cela me permettra de représenter toute la grandeur de cette scène. Je ferai l’éloge de la Rome antique, et la mettrai au service de l’empereur. C’est la composition du Couronnement de Marie de Médicis, peint par Rubens en 1610, qui m’a inspiré, et qui sera conservé au Louvre. Représenter plus de 200 figures sur une toile de 9 mètres par 6 n’est pas de tout repos, j’ai donc élaboré une multitude de croquis, j’ai pris des notes et j’ai recomposé la scène, avec des maquettes en carton, et des figurines en cire. (Avançant vers le tableau 🙂 Il y aura le monde laïc, à gauche, et le monde religieux, à droite, et il y aura cette couronne que Napoléon devait à l’origine déposer sur sa propre tête, qui occupera une place centrale, contrastant avec le pan de rideau vert, mordant sur le pilastre. (En arrivant près de la scène 🙂 D’ailleurs, il n’y a pas assez de dignitaires au premier plan. (Interpellant quelqu’un du public, pour lui faire prendre la place d’un dignitaire) Venez, placez vous ici s’il vous plait. 

REPORTER (l’aidant à placer les gens). Vous feriez un bon dignitaire ici. Madame, venez donc, m onsieur placez vous donc ici, comme les porteurs de regalia…

DAVID (finissant de placer). Allons allons, prenez la pose je vous prie. Voilà qui est mieux. 

Le peintre se place avec les dignitaire sur le côté du tableau.

5. POINTS DE VUE

Le prêtre grec sort du groupe pour s’adresser au public.

PRÊTRE ORTHODOXE. Franchement, un prêtre orthodoxe qui assiste à un sacre chrétien dans une église transformée en temple romain, on aura tout vu. Je ne sais même pas vraiment pourquoi je suis là. On m’a dit que c’était Napoléon qui voulait que toutes les branches du christianisme soient représentées pour donner encore plus de légitimité à son sacre. Mais on m’a aussi dit que c’était le pape qui voulait que je sois là pour le soutenir face )à cet empereur qui se croit tout permis avec la chrétienté. Tout ce que je sais c’est qu’ici tout le monde me prend pour Jésus. J’ai même dû me raser la barbe pour pouvoir sortir tranquillement dans les rues de Paris. Ils sont fous ces français !

César sort du groupe pour interpeller David.

CÉSAR. Ils sont fous ces Gaulois ! Galli inter ista quid facio ?! (Que fais-je au milieu de tous ces Français ?) David, ourquoi m’avoir convoqué sur cette toile ? Vous auriez mieux fait de ne pas me peindre à la dernière minute en plein milieu ces hypocrites. Moi, Jules César, combler le vide ? Me voilà dans l’ombre ce petit Corse aujourd’hui couronné de Lauriers. Et que dire de l’aigle et de l’abeille sur son blason, symboles des victoires militaires sous l’antiquité romaine… Cessons de me manipuler! Vous n’avez qu’à aller voir la petite galerie du Louvre, « Les bustes des douze césars » : ne trouvez-vous pas cela irrespectueux que l’on s’approprie mon image pour en faire de vulgaires souvenirs de voyage ? Ma grandeur est usurpée de tous côtés. Et mon empire est si envié que cette salle s’apparente presque à un temple romain. Ces pilastres en plâtre recouvrant les colonnes de pierre froide de la cathédrale font croire à Napoléon qu’il peut m’égaler. Il n’en est rien ! Regardez Joséphine, le teint si pâle.. elle n’arrive pas à la cheville de ma Cléopâtre. Et puis de toute façon, nous resterons le seul grand couple de l’histoire. Libenter homines id quod volunt credunt… (Les hommes croient volontiers ce qu’ils désirent…).

REPORTER  (S’adressant au pape qui est allé se placer devant son portrait). Sans transition, mesdames et messeirs, nous nous dirigeons maintenant vers le pape Pie VII pour lui poser quelques questions. Votre Eminence, votre présence ici, signifie beaucoup pour la France et son empereur. Quel est votre sentiment sur cette cérémonie ? 

PAPE. Me voilà aujourd’hui résigné à accorder ma bénédiction au sacre de Napoléon Bonaparte. Moi Pie VII, pasteur universel et serviteur du Très Haut, je suis fait prisonnier des desseins politiques de ce blasphémateur qui n’a apporté que désordres et séditions (César applaudit). Seule l’Eglise de Rome est l’unique, la vraie, l’universelle ! Le reste n’est qu’hérésie … Et puis quelle arrogance a-t-il se couronner lui-même ! Date a Cesare quel che è di Cesare e a Dio quel che è di Dio!

6. LA CHUTE

Joséphine et sa suite s’avancent vers le tableau.

REPORTER (coupant le pape). Mais voilà l’Impératrice qui s’avance ! Mesdames et messieurs ! Quel naturel dans la posture, quelle élégance, quelle beauté ! 

L’impératrice chute. La chute produit une onde de choc dans l’assistance.

DAME D’HONNEUR. Oh mais quelle chute ! tout va bien ? Prenez ma main, relevez-vous.. Tous les illustres personnages de notre temps sont présents, ici, et vous, vous êtes là, par-terre ! 

IMPÉRATRICE. Votre présence me réconforte, Adélaide. Restez près de moi. Je suis encore plus stressée que le jour de mon mariage ! Ce couronnement signifie-t-il… renoncer à toutes les soirées cocktail qui m’attendent ?

DAME D’HONNEUR. Ne vous inquiétez pas, Madame.

SŒUR 2. Oh, mais regarde la cette gourde qui vient de tomber. 

DAME D’ATOURS. Nous nous passerons volontiers de vos commentaires désobligeants, restez donc à la place qui est la votre, au second rang et tâchez de ne plus perturber la cérémonie avec vos sarcasmes !

SŒURS 1. Mais pour qui se prend-elle cette servante ? C’est la simple cousine par alliance de Joséphine, qu’elle retourne donc à sa garde robe cette fille sans titre ! 

SŒUR 2.  « Vraiment ? Quel toupet de se comporter avec une telle arrogance. 

DAME D’HONNEUR.  Taisez-vous ! et tâchez de ne plus perturber la cérémonie.

SŒUR 1. Et savais-tu que Madame de la Rochefoucauld n’était qu’une simple bourgeoise avant de se marier ? »

SŒUR 2.  Oh ma soeur, quelle honte ! Mais essayons de nous montrer amical au moins pour aujourd’hui, notre frère devient empereur, nous devons bien nous tenir. 

SŒUR 1. Ah mon petit Napo, nous lui serons éternellement reconnaissantes après ce sacre. Il a notamment parlé de me faire Princesse de Lucques et de Piombino. J’ai tant de projet en tête 

SŒUR 2.  Oh mais oui Elisa, quel homme généreux ! Je lui suis infiniment reconnaissante pour mon second mariage avec Borghese. Cela a fait de moi une Princesse italienne tout en conservant mon indépendance. 

DAME D’HONNEUR.  Silence !

Napoléon couronne Joséphine, en silence (geste choral). Puis le couple impérial se détache du groupe pour la scène de ménage.

IMPERATRICE.  Je suis si navrée de cette chute, votre Altesse, j’espère ne pas vous avoir fait de l’ombre en cette cérémonie si somptueuse. 

EMPEREUR. Nous espérons que vous serez aussi prompte à nous assurer une descendance qu’à vous humilier.

IMPERATRICE. Ô vous n’imaginez pas à quel point je rêvais que ce moment soit grandiose, peut être suis-je trop anxieuse ? Que pourrais-je faire pour que cette cérémonie se déroule comme vous le désirez ? Mon unique volonté est de vous aider à rayonner sur le monde.

EMPEREUR. Nous entendons que vous remplissiez votre rôle d’Impératrice des Français Joséphine. Assurez-nous un héritier qui pourra rayonner sur le monde comme Nous le faisons déjà, en témoigne cette cérémonie.

IMPERATRICE. Pourquoi me demandez-vous ce que je suis dans l’impossibilité de vous apporter ? Le petit Napoléon-Charles, fruit du mariage entre ma fille Hortense et votre frère Louis, sera notre héritier. Vous même en avez exprimé ce souhait.

EMPEREUR. L’Histoire nous regarde Joséphine, assurez-vous d’être vue et non oubliée.

7. L’HISTOIRE NOUS REGARDE

MÈRE. Je l’avais dit que ça se passerait mal. Qu’est-ce que je méprise cette extravagante créole, de toute façon, je n’ai même pas assisté au sacre. Dites moi, David, vous me réservez une place de choix sur le tableau ? 

Tous les membres du sacre se mettent à interpeller David.

IMPERATRICE. David je vous en prie effacez mes 20 ans en trop, prenez en modèle ma fille Hortense !

DAME D’HONNEUR. Faites-moi plus belle que les soeurs jalouses s’il vous plaît”  

HALET EFENDI. Pourquoi avez-vous pris mon prédécesseru comme modèle ?

DES VOIX. Pourquoi m’avez-vous représenté ainsi ? Pourriez-vous m’arranger  le portrait ? Pourriez vous m’ajouter au tableau ? 

DAVID. Stop ! Arrêtez, ne vous inquiétez pas. Tout se passera bien ! (Il relève les doigts du pape : ) D’ailleurs, c’est bien mieux comme ça. Maintenant, il est temps pour moi de prendre place dans mon chef d’oeuvre, auprès de mon épouse, de mes filles, mes élèves, et Joseph-Marie Vien, le maître de mon art. Même en exil, mon passé révolutionnaire est bien loin. Il est temps pour moi de montrer au monde toute la grandeur de mon travail et du pouvoir de l’empereur. Je vous en prie, prenez le temps de marcher dans mon tableau, faites attention aux marches, vous remarquerez que ce vert vous aspire dans la scène. Les personnages vous attendent, si vous voulez leur poser des questions….      

 

 

 

 

 

 

 

 

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