NEUF
Si Alice peut confondre un nouveau-né avec un cochon, au sixième chapitre du roman de Lewis Caroll, c’est bien parce que le mammifère échange facilement sa place avec l’homme sur l’échelle des représentations symboliques, tant ses qualités anthropomorphiques sont évidentes. Il n’est donc pas étonnant de retrouver des cochons se livrer à la même sardane catalane à laquelle Matisse a assisté en observant des pêcheurs et des paysans danser sur une plage. Mais ici nul amincissement des corps, lesquels font ronde, plutôt cercle, comme malgré eux, certains recroquevillés, comme le danseur tête baissée de Matisse, d’autres étendus au « sol », tous appelés par la gravité et leur pesanteur. Si la composition de La Danse de Matisse repose sur le contact manqué de deux danseurs, et des diagonales opposées qui naissent de leur tentative de rejoindre, dans leur ronde-chute, les cochons de Joël Paubel ne se voient même pas, ils tournent et tombent indépendamment les uns des autres vers/sur un sol uniformément vert, ce vert qui chez Matisse était, dans une vision cosmique, la courbe du monde distincte de la profondeur turquoise du ciel. Ici, nul horizon mais une germination constante car dans le cochon détouré d’un trait rose, peut-être peut-on voir un clin d’œil à la grande capacité de croissance de l’espèce porcine. Romain Labrousse Related PostsProjets liés |